Les Ambassadeurs de la mobilité : le projet innovant qui défie la voiture en PACA !
De septembre à novembre 2015, j’ai intégré le projet des Ambassadeurs de la Mobilité, chapeauté par la Métropole Aix-Marseille Provence (Ancienne Communauté du Pays d’Aix), ayant pour objectif de réduire l’usage de la voiture individuelle en sensibilisant directement les usagers, grâce à une opération de marketing individualisé. Le projet s’est appuyé sur une étude comportementale permettant de cerner les mécanismes de blocage et les leviers agissant sur les individus.
Si le projet peut sembler « classique », Les Ambassadeurs de la Mobilité constitue une réelle expérience dans la conduite du changement des mentalités, dans un contexte géographique et phycologique peu favorable.
Il a permis de réduire de 6% l’usage de la voiture individuelle entre juin 2015 et juin 2016 ! Ce bilan peut être comparé aux 12 expériences similaires dans le monde. Rien que ça !
Dans cet article, je vous propose une rétrospective personnelle du projet, en tant qu’Ambassadrice sur le terrain. Ayant été directement confrontée aux contraintes des volontaires, j’ai rapidement compris l’écart entre le projet proposé et le projet expérimenté.
Le pari d’un périmètre géographique audacieux
Expérimenté à une échelle locale (la commune de Venelle et l’éco-quartier de la Duranne à Aix-en-Provence), le projet des Ambassadeurs visait à recruter 400 volontaires pour répondre à une enquête et changer leurs habitudes de déplacements « dans la mesure du possible ».
Les volontaires, résidents de deux zones géographiques isolées, ont accepté de répondre à notre enquête qui recensait leurs habitudes de déplacement. Le problème récurrent était la mauvaise desserte par les transports en commun des trajets pendulaires (domicile-travail). Une grande partie des volontaires que j’ai pu interroger travaillaient sur Aix-en-Provence, quand le dernier bus finissait son service à 19h30. Pour plus de flexibilité dans leurs déplacements, ces volontaires ont choisi “par défaut” d’utiliser la voiture. Il m’est moi-même arrivée de me faire raccompagner au centre ville d’Aix-en-Provence (où je résidais) par les volontaires, ce qui est un comble !
« Il m’est moi-même arrivée de me faire raccompagner au centre ville d’Aix-en-Provence (où je résidais) par les volontaires, ce qui est un comble ! »
La Région PACA, troisième région la plus émettrice de GES (gaz à effet de serre) est aussi une région qui a 30 ans de retard sur le développement de modes de transports alternatifs à la voiture individuelle. Dans les faits, l’approximation des horaires de passage ou de desserte de certains arrêt de bus, tout comme le mauvais entretien de certains arrêts était très significatif.
Les Ambassadeurs de la mobilité, c’est une vraie aventure !
Le marketing individualisé, au cœur de la stratégie du projet
Les Ambassadeurs de la Mobilité, c’est avant tout une démarche de marketing individualisé. Kesako ? Le marketing individualisé c’est une offre adaptée au public à qui l’on s’adresse. S’agissant des volontaires, nous leur proposions les meilleures solutions pour se déplacer d’un point A à un point B, en prenant en compte leurs contraintes, dans la mesure du possible.
Dans plusieurs cas, je me suis rendu compte que les volontaires ne connaissaient pas l’ensemble des offres de transport mises à disposition par la collectivité pour les accompagner dans leurs déplacements : site de covoiturage, bonus écologique pour l’achat d’un vélo électrique, parking relais…
En plus d’un travail de communication, il nous a fallu mener un travail d’éducation à la mobilité auprès d’un public qui ne savait pas toujours lire un plan de bus, ou situer l’arrêt de bus qui leur permettrait de se rendre à la destination souhaitée. Ayant moi-même pris le bus pour me déplacer (devoir d’exemplarité oblige), j’ai dû admettre que les directions n’étaient pas toujours bien indiquées pour trouver les emplacements des arrêts, et qu’une fois à bord, vous avez intérêt à savoir ou vous allez, parce que ce n’est pas le chauffeur qui va vous aider !
Entre hésitation et méfiance, il a fallu lever les réticences des volontaires !
Autre défi : relever les réticences des volontaires au projet. Certes, ils étaient volontaires me diriez-vous, mais cela ne fait pas tout. Lorsqu’un enquêteur inconnu vient chez vous pour vous poser des questions sur vos habitudes personnelles, cela peut engendrer un sentiment de méfiance. Particulièrement chez les personnes âgées et isolées qui n’ont pas l’habitude de voir des jeunes qui ne sont pas du coin. Sans leur présenter un badge, certains habitants refusaient de répondre à l’enquête ! Ces freins psychologiques ont pu être levés en faisant comprendre aux volontaires qu’ils n’étaient pas jugés, et que les Ambassadeurs ne diffusaient aucune information personnelle publiquement.
Ayant pris en compte ces paramètre, nous avons adopté une stratégie de rapprochement avec les citoyens des communes des volontaires. Pour cela, notre équipe d’Ambassadeurs s’est rendue dans les lieux fréquentés par les habitants pour recruter de nouveaux volontaires : le marché était notre point le plus stratégique. Il nous a permis d’interpeller les potentiels volontaires, sur un lieu public, dans un contexte ou ils étaient disposés à nous écouter. Ce travail de terrain, au plus proche des citoyens s’est avéré être un vrai succès !
Les clefs du succès : Associer les acteurs locaux à la démarche !
Afin d’asseoir l’ancrage local du projet des Ambassadeurs de la mobilité, nous nous sommes appuyés sur un réseau associatif et institutionnel. Parmi eux, les associations, les écoles, et le Bureau des Energies Nouvelles de la commune de Venelles. Ces différents acteurs ont facilité la légitimation du projet auprès des citoyens, en servant d’interlocuteurs relais entre les Ambassadeurs et les volontaires.
Par ailleurs, le projet n’aurait pas pu voir le jour sans les deux maitres d’œuvre : Auxilia, le cabinet de Conseil qui m’a employée) et Wimoov, association d’accompagnement à la mobilité inclusive. Ces deux acteurs majeurs ont déployé la stratégie de terrain à mener avec les volontaires.
Un projet solide qui fédère une communauté de volontaires
Le projet des Ambassadeurs de la Mobilité a cherché à fédérer une communauté de volontaires, grâce à l’organisation d’évènements, mais également grâce aux réseaux sociaux. Le groupe Facebook des Ambassadeurs a permis aux volontaires d’interagir, et de valoriser leur démarche « éco-mobile ». Cette opération de marketing territoriale par le biais des réseaux sociaux a donné de la voix au projet, qui a bénéficié d’une notoriété et d’une reconnaissance locale, par la presse, mais surtout nationale par des prix !
Bilan : un projet audacieux, hautement récompensé !
Les Ambassadeurs de la mobilité ont connu un réel succès lié aux résultats très positifs du projet : – 6% d’utilisation de la voiture en un an, soit 1000km évités sur un territoire qui n’était pas prédisposé à remporter son adhésion. La démarche de marketing individualisé a séduit les volontaires qui se sont engagés à réduire leur utilisation individuelle de la voiture, et lui préférer un report modal (transports en commun ou marche à pied pour la plupart).
Le projet s’est vu remettre le prix de la meilleure initiative des Challenge du Transport Public au Sénat en 2015 et celui des Trophées Eco Actions, à l’Assemblée nationale en 2017.
Je suis fière d’avoir participé à cette belle aventure et d’avoir travaillé à la construction d’un projet à dimension humaine où des individus m’ont ouvert leurs portes pour se laisser conduire sur la voix de la Mobiliberté !